Traverser le Canada en 40 jours

Alors que j’écris ces mots, c’est déjà la fin de mon voyage. Je suis attablée à un café de Victoria, en Colombie-Britannique, et j’ai devant moi une liste toute griffonnée. Ça y est, je l’ai fait : j’ai traversé le pays de bout en bout en 40 jours. C’est en juin que mon voyage a commencé, lorsque j’ai pris l’avion pour Terre-Neuve avant de sauter à bord du train à Halifax, direction l’ouest. Lorsque j’ai pris conscience de tout ce que pouvait m’apporter cette carte Canada 150 pour les jeunes, j’ai laissé tomber tous mes autres plans de l’été et je me suis attelée à orchestrer ce fabuleux voyage à travers mon pays. J’avais des idées à n’en plus finir sur tous les endroits que je voulais voir et tous les événements auxquels je voulais assister. Au final, j’en ai concrétisé un bon nombre.
Jasper-Train-Greeting-with-

J’ai parcouru les Tablelands du Gros-Morne, foulant ainsi le manteau terrestre. J’ai fait la fierté de mes parents bibliothécaires en visitant la bibliothèque centrale de Halifax. J’ai exploré la scène politique d’hier et d’aujourd’hui à Ottawa et visité l’Assemblée nationale à Québec. J’ai acheté un chapeau de cow-boy au Stampede de Calgary, fait une croisière en bateau jusqu’à Spirit Island dans le parc national de Jasper, en Alberta, et pédalé sur la digue de Vancouver. Il y a un mois, je pensais que je raconterais l’histoire d’une voyageuse solitaire en son pays. Mais je me rends compte aujourd’hui que ce serait une description très inexacte. En fait, en juillet 2017, personne n’a vraiment voyagé seul.

Signal-Hill,-St.-John's

Cape-Spear---easternmost-poÀ Terre-Neuve, Jenna, qui avait également étudié à l’Université Mount Allison, m’a accueillie à St. John’s. Tout en travaillant, elle m’a envoyée à la découverte des vues spectaculaires de Signal Hill jusqu’à Cape Spear — le point le plus à l’est de l’Amérique du Nord. Je n’ai pas eu l’occasion de participer à une soirée d’initiation à grands coups de rhum « Screech », mais j’ai fait l’expérience de la célèbre vie nocturne de George Street. Et même si je ne suis vraiment pas très calée en sports et que je ne connaissais pas les paroles de Bud the Spud de Stompin’ Tom Connors, Jenna et ses amis m’ont pardonné mon ignorance. Même à la fin de ce voyage, le Canada atlantique reste pour moi l’endroit le plus sympathique.

Mon premier voyage en train était de Halifax à Québec. Mon étui de guitare a attiré l’œil des autres jeunes qui avaient la carte Canada 150 et il n’a pas fallu longtemps avant qu’on remplisse de musique la voiture-restaurant. À nous cinq, nous avions un répertoire assez vaste pour nous occuper durant la traversée des régions sans réseau du Nouveau-Brunswick. Nous étions trois à alterner guitare, ukulélé et chant. Les deux autres prenaient des vidéos pour leurs blogues vidéo. Ils riaient d’eux-mêmes en nous montrant leurs vidéos, et s’excusaient de leur nature embarrassante, mais pour moi, ce n’était pas du tout embarrassant. La plupart des Canadiens passeront toute leur vie sans rien voir de leur propre pays, alors que nous, sans même avoir obtenu notre diplôme du secondaire, nous voyagions déjà d’un bout à l’autre. J’étais impressionnée qu’ils aient eu la prévoyance de documenter cette aventure.

Je me suis fait sans cesse de nouveaux amis à bord du train, mais à chaque arrêt, j’ai repris contact avec d’anciens amis de différentes périodes de ma vie. Chacun d’entre eux m’a fait découvrir la culture canadienne propre à sa région. À Québec, avec Nadine, ma complice d’immersion française, nous étions tout excitées de nous entraîner à commander à boire sur Grande Allée et d’explorer cette partie bien française du Canada. À Ottawa, Dylan, un ami d’université versé en politique, a fait appel à ses contacts privilégiés pour m’offrir une visite privée de la Colline parlementaire. Je n’oublierai jamais mon passage dans l’édifice du Centre, tandis que je l’écoutais donner vie au portrait de chaque premier ministre en partageant une anecdote amusante. Le soir, Julia, ma guide pédestre de Narcity, m’a emmenée au El Camino, au marché de Byward et à une drôle de soirée dans une ruelle qui ressemblait à une fête de plage doublée d’un cours de peinture.

Quant à la côte ouest, elle m’a offert toute la beauté de la nature, des moments de relaxation et des activités de plein air. Alors que le train entrait en gare de Jasper, je voyais par la fenêtre ma meilleure amie qui m’attendait avec sa planche longue et un bouquet de fleurs. Jen avait planifié une fin de semaine absolument parfaite à Jasper, avec une croisière en bateau sur le lac Maligne, du kayak et une randonnée pour voir les chutes d’Athabasca. En Colombie-Britannique, l’excursion à bord du traversier de Vancouver à Victoria était toute une attraction en soi. Hanna, une ancienne collègue, m’attendait sur le quai. Sa vie à Victoria avait le même rythme insouciant que celle d’un retraité. Elle m’a montré son café préféré, caché dans le plus vieux quartier chinois du Canada, nous a conduites au sommet du mont Douglas pour contempler la vue à 360 degrés de la ville et m’a fait découvrir le Fisherman’s Wharf.

Maligne-Lake,-JasperParliament-2
Ce voyage qui avait commencé sous forme de liste d’endroits à visiter s’est transformé en une mosaïque de rencontres mémorables : depuis Claire, mon amie de Calgary, qui a accepté à contrecœur d’apprendre avec moi le two-step à Nashville North, jusqu’à François, qui voyageait lui aussi avec la carte Canada 150 et chantait des chansons françaises avec son ukulélé alors que le train filait dans la nuit en direction de Québec. Ce voyage m’a fait vivre des expériences absolument uniques, mais il m’a surtout permis de tisser tout un été d’amis inoubliables.

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